Joueurs amateurs français célèbres au XVIII° & XIX°

Au milieu du XVIIIe siècle, les joueurs possèdent leur lieu de rendez-vous, le Café de la Régence, qui verra s'affronter Voltaire, Diderot, Jean-Jacques Rousseau, d'Alembert, Grimm, Beaumarchais puis des révolutionnaires comme La Fayette, Marat, Barras, Camille Desmoulins. Maximilien de Robespierre en était un des partenaires les plus assidus. Napoléon aurait également été un des habitués.




 Dessin de M. Horsin-Déon d'après photographies. L. Chapon, graveur. Paris, 1874.
BNF, Estampes et Photographie (Kh 449 Fol T. 3 M.23 192)
 Les principaux joueurs d'échecs du café de la Régence.












Voici une brève présentation de quelques amateurs célèbres

NAPOLEON
Bonaparte jouait souvent au café de la Régence à Paris avec beaucoup d'impatience et n'aimait pas perdre... Pendant les campagnes militaires  (campagne d'Italie,  Egypte, Russie)  il jouait assez souvent avec ses  compagnons militaires. Lors de son exil à Sainte Hélène il continua de jouer.

Ce n'était pas, parait-il, un grand joueur... de plus il trichait !
A Malmaison,  Bonaparte invita Mme de Rémusat  lors de la soirée du 20 mars 1804 à jouer après le dîner ; mais, dit elle, le jeu du premier consul était fort médiocre. De plus il ne voulait pas se soumettre à la marche normale des pièces. Mme de Rémusat le laissa faire "ce qui lui plaisait". 


  Extrait du tableau de Jehan-Georges Vibert (1840-1902) : « Napoléon et le cardinal Fesch » jouant aux échecs

Le célèbre Turc mécanique, racheté et rénové par  Maelzel  fait de nouvelles apparitions, en particulier dans une partie contre Napoléon Bonaparte.
En 1809, Napoléon se présente au palais de Schönbrunn pour jouer contre le Turc mécanique. Selon les témoins, Maelzel s'occupe personnellement de la préparation de la machine avant la partie, et le Turc (contrôlé à l'époque par le joueur d'échecs Johann Baptist Allgaier) salue Napoléon avant la partie. Les détails de cette partie sont relatés dans de nombreux témoignages, dont beaucoup sont contradictoires. Selon Bradley Ewart, Napoléon joue à une table séparée entourée d'un cordon et ne s'approche pas du Turc mécanique, c'est Maelzel qui fait le déplacement entre les deux tables pour déplacer les pièces de chaque adversaire devant les spectateurs. Napoléon tente de prendre le Turc par surprise en jouant en premier alors que le Turc joue toujours en premier, mais Maelzel laisse la partie continuer. Napoléon tente ensuite un coup illégal. Le Turc mécanique le remarque, remet la pièce en place et continue de jouer. Napoléon tente à nouveau un coup illégal, et cette fois le Turc retire complètement la pièce jouée du jeu et continue la partie. Lorsque Napoléon tente un troisième coup illégal, le Turc renverse toutes les pièces de l'échiquier. Selon cette version, Napoléon est amusé par la situation et demande à jouer une partie normale, dans laquelle il joue dix-neuf coups avant de renverser son roi en signe d'abandon. Mais selon d'autres versions de l'histoire, Napoléon est mécontent d'avoir perdu contre la machine, demande à rejouer, et joue une partie avec un aimant sur l'échiquier, puis une autre en faisant cacher la tête et le corps du Turc par un châle pour essayer de l'empêcher de voir.

Il resterait 3 parties notées  ( Chessbase) de Napoléon, mais "Des trois parties notées de Napoléon, aucune n’est réelle, inventées puis recopiées et commentées à l’envi par des chroniqueurs peu curieux."
 
En complément voir notre article détaillé consacré à l'ouverture Napoléon et  à  l'analyse des 3 parties  traditionnellement attribuées  à Napoléon...

Sources:
Napoléon.org
MJAE
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VOLTAIRE
Une des grandes distraction de Voltaire est de jouer aux échecs. Marmontel en visite à Ferney raconte : "Gaulard poliment joue aux échecs avec Voltaire qui adore ce jeu, mais a horreur de perdre. Gaulard sait perdre, aussi Voltaire le trouve t-il plein de qualités." 
                                 Voltaire jouant aux échecs avec le père Adam. Tableau de Huber.

Voici ce que Voltaire écrit de ce père Adam le 12 février 1764:  "J'oubliais de vous dire que nous avons un jésuite qui nous dit la messe très proprement ; enfin, c'est un jésuite dont un philosophe s'accommoderait". Il ajoute sur les échecs : "Je les aime, je me passionne et le père Adam qui est une bête m'y gagne sans cesse, sans pitié ! Tout a des bornes ! Pourquoi suis-je, aux échecs et pour lui, le dernier des hommes ? Tout a des bornes..."

Quand la partie s'annonçait mal pour lui, Voltaire se mettait à chanter une sorte de "tourloutoutou" que le père Adam écoutait comme un affreux présage. Plus d'une fois, on vit le père s'enfuir en courant, bombardé par les pièces du jeu qui s'accrochaient dans sa perruque. Parfois, poursuivi par la canne, il se cache dans un placard. L'orage s'apaisait vite. Voltaire demandait: "Adam, ubi es ?" Adam réapparaissait, on lui avait pardonné son involontaire victoire.  La princesse Daschoff, dame d'honneur de Catherine II de passage à Genève en 1771 écrit dans ses mémoires: "Huber et Voltaire combattaient souvent aux échecs. Voltaire perdait toujours, et dans ces occasions, il ne manquait jamais de laisser éclater sa mauvaise humeur.


Source:
Chronique




 ROUSSEAU

Rousseau, le Philosophe des Lumières ,est aussi un joueur d'échecs passionné, doué et d'un bon niveau... 




 Quelques extraits  d'ouvrages  Jean-Jacques Rousseau :

 Il s’avisa de me proposer d’apprendre les échecs, qu’il jouait un peu. J’essayai presque malgré moi ; et, après avoir tant bien que mal appris la marche, mon progrès fut si rapide, qu’avant la fin de la première séance, je lui donnai la tour qu’il m’avait donnée en commençant.

 Il ne m’en fallut pas davantage : me voilà forcené des échecs. J’achète un échiquier, j’achète le Calabrois : je m’enferme dans ma chambre, j’y passe les jours et les nuits à vouloir apprendre par cœur toutes les parties, à les fourrer dans ma tête bon gré mal gré, à jouer seul sans relâche et sans fin. Après deux ou trois mois de ce beau travail et d’efforts inimaginables, je vais au café, maigre, jaune, et presque hébété.

 Je m’essaye, je rejoue avec M. Bagueret : il me bat une fois, deux fois, vingt fois ; tant de combinaisons s’étaient brouillées dans ma tête, et mon imagination s’était si bien amortie, que je ne voyais plus qu’un nuage devant moi. Toutes les fois qu’avec le livre de Philidor ou celui de Stamma j’ai voulu m’exercer à étudier des parties, la même chose m’est arrivée ; et après m’être épuisé de fatigue, je me suis trouvé plus faible qu’auparavant. Du reste, que j’aie abandonné les échecs, ou qu’en jouant je me sois remis en haleine, je n’ai jamais avancé d’un cran depuis cette première séance, et je me suis toujours retrouvé au même point où j’étais en la finissant. Je m’exercerais des milliers de siècles que je finirais par pouvoir donner la tour à Bagueret, et rien de plus. Voilà du temps bien employé ! direz-vous. Et je n’y en ai pas employé peu. Je ne finis ce premier essai que quand je n’eus plus la force de continuer.

=> En complément voir notre article détaillé sur JJ Rousseau et les échecs
Source
Morbleu
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 DIDEROT
Denis Diderot (1713-1784), le Père de l'encyclopédie était un joueur d'échecs.  Aussi surprenant que cela puisse paraître, pour Denis Diderot  :
"Il y a du hasard aux échecs et à tous les autres jeux de l'esprit et pourquoi n'y en aurait-il pas ? L'idée sublime qui se présente où était-elle l'instant précédent ? "
 


L’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers est une encyclopédie française, éditée de 1751 à 1772 sous la direction de Diderot et D’Alembert.
Comme ses deux  concepteurs étaient de fervents joueurs d'échecs, habitués du café de la Régence, ils ont bien sûr consacré un article au noble jeu illustré d'un jeu de style régence, original par les canelures de ses pièces qui en font un modèle unique.


 

Diderot, ami de Philidor , fréquentait le café de la Régence, comme le relate son livre "Le neveu de Rameau", considéré comme une autobiographie. Joueur de niveau modeste, mais supérieur à d'Alembert, son intérêt est réel.
Il lui arrive même de proposer un avis technique à Sir Legal (professeur de Philidor) ou encore d'analyser le caractère de ses adversaires.


Source:

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GUYTON-MORVEAU
Louis-Bernard Guyton-Morveau 
né en 1737, mort en 1816, est un chimiste et un homme politique français. Elu député à l'Assemblée législative en 1791. Réélu à la Convention nationale par le département de la Côte-d'Or, il entre le 6 avril 1793 au Comité de salut public. Il participa à la création du Calendrier républicain et  essaya de modifier les règles du jeu d’échecs afin qu'il représente les nouvelles valeurs révolutionnaires (ce qui échoua !).

Voici ses réflexions:

 "Sera -t-il permis à des Français de jouer à l'avenir aux échecs ? Cette question fut agitée, il y a quelques jours, dans une société de bons républicains, et il fut conclu, comme on devait s'y attendre, par la négative absolu." 

"Mais on demanda ensuite s'il ne serait pas possible de républicaniser ce jeu, le seul qui exerce véritablement l'esprit..." 

"Tout le monde sait que le jeu d'échecs est une image de la guerre ; jusque là rien qui répugne à un républicain..." 

"Ce sera le jeu des camps, ou si l'on aime mieux de la petite guerre. Le mot échecs a une étymologie royale ; c'en est assez pour le condamner à l'oubli..." 

"Le personnage principal sera le porte drapeau, ou pour mieux dire, le drapeau. Il ne sera pas difficile de donner à la pièce une forme convenable à cet attribut ; elle tiendra la place du ci-devant roi [...] ; lorsqu'on l'attaquera, on en avertira par ces mots : au drapeau ; lorsqu'elle sera forcée, on criera victoire ; lorsqu'elle sera seulement enfermée, on dira blocus..." 

"La pièce appelée si bêtement reine ou dame sera l'officier général, pour abréger, l'adjudant. Les tours seront les canons, et l'on ne cherchera plus le rapport de leur mobilité avec leur dénomination. Roquer sera mettre un canon près du drapeau ; on l'annoncera en disant : batterie au drapeau. Les fous représenteront la cavalerie légère, les dragons. Les ci-devant chevaliers étaient déjà descendus au rang de cavaliers. Les pions formeront l'infanterie [...] quand ils auront enfoncé le camp ennemi jusqu'à sa limite [...] leur nouvelle marche ne sera plus que l'image naturelle de l'élévation en grade d'un brave soldat." 

Extrait du Moniteur du 20 brumaire an 2 (10 novembre 1793)

Source
Wikipédia
MJAE




MUSSET
Dans les dernières années de sa vie trop brève, le poète blasé, l’amoureux blessé semblait n’avoir conservé qu’un seul amour les échecs.
Installé au café de la Régence, d’un signe, il sollicitait un joueur, toutefois rares étaient ceux qu’il admettait à l’honneur de faire sa partie.( Octave Feuillet, son collègue à l’Académie française  ; Jules Grévy ; le mathématicien Binet ; l’élève de Pradier, le sculpteur Lequesne ; l’écuyer Baucher...)

La partie était-elle engagée que le rêveur taciturne s’animait. La physionomie, le geste, la parole semblaient ressuscités. Son jeu, fantaisiste, brillant, plein d’inattendus, romantique comme sa plume, décontenançait son adversaire. Parfois aussi, ce dédain des débuts, classiques le jetait en d’inextricables embarras, prédécesseurs d’un mat fâcheux qui, s’il faisait sourire la « galerie », provoquait de sa part des fureurs d’enfant gâté et puni.
On peut dire, en somme, sans que cela puisse jeter une ombre sur sa glorieuse mémoire, qu’il était un assez « mauvais joueur ». Gagnant, satisfait et narquois ; perdant, penaud ou furieux.


On prétendait un jour, devant le grand poète, que le mat par deux Cavaliers était impossible. Musset rumina la question et le lendemain, il attachait son nom à un problème célèbre, le seul qu'il nous ait laissé.  
Voir ce fameux problème 

Source
http://www.france-pittoresque.com/spip.php?article5821
MJAE







COMPLEMENTS
Les célébrités aux échecs '"PDF" de Jean Paul Teyssier

Lien direct
 
 Wikipédia: joueurs français

Quelques célébrité françaises pratiquant les échecs :
Guy Béart, DSK, Bruel, C Aznavour, JP Chevènement,  Joe Dassin, Yves Rénier, Michel Constantin,

Liste De Joueurs D echecs En Amateur Celebres